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En Irlande, rejet de la réforme visant à moderniser les références à la femme et à la famille dans la Constitution

Lors d’un référendum organisé en Irlande vendredi, les habitants ont rejeté la réforme visant à moderniser les références aux femmes et à la famille dans la Constitution, rédigée en 1937 et héritière de la longue et forte influence de l’Eglise catholique sur la vie publique et privée.
Coup dur symbolique pour les femmes, et à rebours d’une classe politique dont les principaux partis avaient défendu le “oui”, les électeurs irlandais ont désapprouvé l’élargissement du concept de famille au-delà de la notion de mariage, et l’effacement du texte du rôle prioritaire des mères à assurer les « devoirs domestiques » dans un foyer.
Le premier amendement proposé – sur la définition de la famille – a vu le “non” l’emporter avec 67,69 % des voix, selon les résultats officiels annoncés vers 20 heures, samedi.
Le résultat sur le deuxième amendement devait être connu plus tard, mais avant même l’annonce des résultats, le premier ministre, Leo Varadkar, dont le gouvernement de centre droit avait initié la réforme, avait reconnu son rejet.
« Il était de notre responsabilité de convaincre une majorité de personnes de voter “oui” et nous avons échoué à le faire », avait-il déclaré devant la presse, alors que beaucoup de responsables politiques expliquent cet échec par la formulation confuse du texte soumis au vote. Ce référendum a suscité peu d’enthousiasme, avec une participation qui n’a pas dépassé les 50 % dans la plupart des 39 circonscriptions.
Avant la prise de parole du premier ministre, plusieurs autres membres du gouvernement avaient d’ores et déjà concédé la défaite, le ministre de l’égalité, Roderic O’Gorman, cité par le quotidien The Irish Times, se disant déçu et regrettant que les gens n’aient « pas vu l’urgence en faveur du changement » de la Constitution.
Avant le vote, le premier ministre, Leo Varadkar, avait estimé qu’une victoire du « non » ferait faire « un pas en arrière » au pays. « Cela enverrait à de nombreuses personnes le message qu’ils ne sont pas une famille selon notre Constitution », avait-il affirmé, tandis que serait maintenu « le langage très démodé sur les femmes au sein du foyer, et les devoirs des mères au sein du foyer ».
L’Irlande, pays de l’Union européenne aux 5,3 millions d’habitants, a légalisé le mariage pour les couples de même sexe en 2015, et l’avortement en 2018. Le gouvernement comptait sur ce double référendum, organisé le 8 mars, Journée internationale des droits des femmes, et au moment où la France entérinait l’inscription du droit à l’avortement dans sa propre Constitution, pour effacer un peu plus l’empreinte laissée par l’Eglise catholique dans les institutions du pays.
« C’est un jour triste pour ceux qui militent depuis des décennies pour se débarrasser de ces mots sexistes » dans la Constitution, a ainsi réagi la sénatrice travailliste Marie Sherlock sur la radio RTE. La directrice du National Women’s Council, Orla O’Connor, a jugé que ce vote devait servir de « prise de conscience » pour les droits des femmes en Irlande.
« Le peuple a parlé. Il a fait entendre sa voix et doit être entendu. Les propositions du gouvernement ont échoué », a estimé, de son côté, la cheffe du Sinn Fein, Mary Lou McDonald, partisane du “oui”, accusant l’exécutif de n’avoir pas suffisamment consulté en amont sur la réforme proposée.
« C’est une victoire significative du peuple contre l’establishment politique », s’est félicité auprès de l’Agence France-Presse Peadar Toibin, chef du parti conservateur Aontu, qui avait soutenu le “non”. « Le gouvernement avait défendu ces amendements comme s’ils étaient progressistes (…) mais en réalité ils ne l’étaient pas », en particulier en ce qui concerne leurs répercussions sur les soins dus aux plus fragiles dans la société, a-t-il ajouté.
Jusqu’à quelques jours du scrutin, les sondages prédisaient une victoire assez facile du « oui », mais les derniers sondages avaient révélé une incertitude croissante. Les électeurs devaient se prononcer sur deux questions. La première concernait la définition de la famille, proposant de l’élargir pour inclure également les « relations durables » comme les couples en concubinage et leurs enfants. La seconde question proposait d’effacer une référence jugée dépassée sur le rôle des femmes dans le foyer, qui suggère qu’elles ont le devoir de prendre soin des autres personnes sous leur toit. Une nouvelle formule, plus large, imputerait à tous les membres d’une famille la responsabilité de prendre soin les uns des autres.
Les opposants à ces changements avaient critiqué des formulations vagues, en particulier sur la deuxième question, et la disparition des mots « femme » et « mère » du texte. « Personne ne sait exactement ce qu’est une “relation durable”, alors que tout le monde sait exactement ce qu’est un mariage », avait ainsi fustigé David Quinn, fondateur de l’Institut Iona, un groupe défendant les intérêts de la communauté catholique. Des militants pour les droits des personnes handicapées accusaient aussi le texte de déresponsabiliser l’Etat en matière de prise en charge et de soin de ces personnes.
Le Monde avec AFP
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